Pierre-Yves Modicom (Université Bordeaux Montaigne)
à Sorbonne Université, centre Malesherbes
Lundi 14 février 2022 à 14h
Amphithéâtre 117
La notion de construction existentielle ou d’énoncé existentiel est fréquemment employée dans la description des langues à propos de tournures assimilées au français il y a ou à l’anglais there is / there are. Mais cette notion ne va pas sans poser des difficultés si l’on s’extrait des cas prototypiques dans les langues à partir desquelles elle a été posée. Ainsi, l’affirmation selon laquelle l’entité dont on affirmerait l’existence serait obligatoirement un groupe nominal indéfini (il y a beaucoup d’étudiants à Malesherbes) ne résiste pas à l’analyse (tiens, il y a Jean dehors!). De la même manière, on peut se demander ce qu’il en est de la notion même d’ « existence » dans de tels cas de figure : ne s’agit-il pas plutôt d’indiquer la présence de quelque chose quelque part ? Comme distinguer ces deux valeurs ? Et le faut-il ? Quelles sont les implications pour le statut de l’indication de lieu dans ces tournures ?
Dans des langues comme le néerlandais et les langues scandinaves, la syntaxe est extrêmement sensible à la structuration de l’information (notamment : de quoi parle-t-on, pour en dire quoi ? Qu’est-ce qui est réputé connu, qu’est-ce qui ne l’est pas?). En outre, ces langues ont pour point commun de présenter une tournure existentielle comparable au there anglais (er en néerlandais, der dans les langues scandinaves, à des degrés de généralisation divers), mais avec un stade de figement bien moindre, et donc davantage de flexibilité. Je m’intéresserai donc prioritairement à la syntaxe et à la sémantique de ces tournures en er / der, et le cas échéant à leur concurrence avec les tournures impersonnelles mobilisant un pronom neutre (het, det). Je m’appuierai en particulier sur des traductions garantissant une comparabilité immédiate des tournures. Je m’efforcerai de montrer que l’existentialité et la présentativité sont en fait deux avatars pragmatiques d’un même grand domaine de sens, dont je proposerai un concept comparatif. Ce domaine peut faire l’objet de saisies constructionnelles diversement conventionnalisées, ce qui implique de suspendre préalablement tout jugement sur l’existence de « constructions existentielles » dans les langues que l’on s’attache à décrire et à comparer.
La conférence est ouverte au plus grand nombre, l’objet d’études étant susceptible d’intéresser des spécialistes d’autres langues et/ou de linguistique générale.
La conférence sera également diffusée en direct sur Zoom.
Contact : sarah.neslii (à) gmail.com